À 10 heures du matin, il y a comme un signal invisible, un battement secret que chacun ressent sans qu’on ait besoin de se le dire.
La matinée est déjà bien avancée.

C’est l’heure !

Chacun a commencé sa journée à son rythme, en silence ou en musique, entre lecture, jardinage ou les gestes tranquilles du quotidien.
Lui, est peut-être allé promener le chien ou feuilleter le journal au salon. Elle, a peut-être arrosé les plantes, répondu à une amie ou juste profité du calme.
Il n’y a pas de contrainte, plus de réveil qui bouscule, plus d’horaires à respecter.
Mais à dix heures, quelque chose les rassemble.

A notre âge, c’est le petit miracle de chaque matin

L’odeur du café commence à se répandre doucement, comme un parfum familier qui annonce la pause
Ils se retrouvent, comme chaque matin, dans la cuisine ou sous la véranda, selon la saison.
Une lumière douce entre par la fenêtre, posant des reflets tièdes sur la table. L’air a ce parfum mêlé de café tout juste versé.
Il prépare son thé, il remplit sa tasse d’eau chaude ou parfois c’est l’inverse.
Il n’y a pas de règle. C’est leur rituel.
Ce n’est pas tant la boisson qui compte que le moment.

Parler pour se retrouver

Ils s’assoient . . . se regardent.
Un sourire suffit pour dire bonjour à nouveau, pour dire : «Je suis là»
Les mots viennent tranquillement.
On parle de la nuit qu’on a eue, de la promenade du chat, du rêve un peu fou qu’on a fait et qu’on essaie de raconter en riant.
On revient sur un souvenir, une chanson entendue hier, un projet pour le repas de midi ou une idée pour le week-end.
Tout se dit sans urgence. On partage le silence autant que les mots. Il n’y a pas besoin de remplir les vides.
On se connaît depuis si longtemps . . .

Les choses simples font les beaux moments

Parfois, la radio murmure en fond, parfois il n’y a que le bruit de la cuillère dans la tasse.
Ils se taquinent, se racontent, se confient encore, même après toutes ces années.
Dix heures, c’est leur rendez-vous quotidien.
Celui où l’on ne parle pas de choses graves ou alors juste un peu, en douceur, pour mieux les apprivoiser.
Celui où l’on se redécouvre chaque jour, un peu plus.
Ce n’est pas un grand événement, mais c’est un pilier.
Un instant qui dit que le temps passe, oui, mais qu’il peut être beau.
Qu’il y a encore tant à se dire, à partager, à goûter ensemble, même si c’est juste une gorgée ou un sourire échangé entre deux silences.

Et demain, à la même heure . . .

Et quand le moment se termine, ils se lèvent sans se presser.
Chacun retourne à ses activités, à ses petits projets.
Mais le cœur est plus léger.
On s’est retrouvés.
On s’est parlé.
Demain, à dix heures, on recommencera et ce sera tout aussi précieux.

Jean-Luc MARTIN